mercredi 30 août 2017

Festival de Loire


Festival de Loire






Quand notre Loire, en habit de Lumière

Revit au rythme de son glorieux passé

Des amoureux aux mœurs marinières

En Orléans aiment à se retrouver





Tous ces mariniers au grands chapeaux

Se pressent sur le quai pour célébrer

La belle dame Liger au fil de l'eau

Pour un festival de l’amitié

Pour les visiteurs, leurs vieux bateaux

Parés de leurs habits de fête

Invitent la foule des badauds

À tenter de faire leur conquête




Ici tous les marins sont d'eau douce

Ils ont des voyages plein les yeux

Capitaine, matelot ou bien mousse

Dans cette foule, ils font des envieux

Ils accueillent sans trop de manières

Tous les curieux sur leurs gréements

Offrant des récits peu ordinaires

Qui abolissent à jamais le temps




Des chansons entraînent les curieux

Sur des refrains tous à la gloire

De ces seigneurs qui étaient les gueux

De notre glorieuse marine de Loire

Si nos bons vins se laissent boire

Tous les coteaux de nos régions

Libèrent des récits qu’il faudra croire

Lors de soirées sans modération




S’ils se donnent ainsi en spectacle

C’est pour que vous ayez le tournis

Car sur la Loire, maudit tabernacle

On n’a pas à subir le roulis

Les amoureux de notre Loire

Sur la rivière vont se réunir

Pour que bien loin de nos déboires

Chacun puisse à son tour la chérir




Quand notre Loire en habit de Lumière

Revit au rythme de son glorieux passé

Des amoureux aux mœurs marinières

En Orléans aiment à se retrouver



Photographies Pirate de Loire
Patrick Loiseau
et
Pascal Masson

Affiche du haut
Nadine Richardson  
Affiche du Bas
Orléans  Métropole 
 

Vous pourrez m'y retrouver et m'écouter vous conter la Loire




Festival de Loire
Mercredi 20 septembre
SCÈNE DE LA CALE SUD
15h30 Contes de Loire (CNabum)
17h Les Copains d’Sabord (chants de marins)
Jeudi 21 septembre
SCÈNE DE LA CALE SUD
15h30 Contes de Loire (CNabum)
17h Babord Tribord (chants de marins)
Vendredi 22 septembre
SCÈNE DE LA CALE SUD
15h30 Contes de Loire (CNabum)
17h Les Fis d’Galarne (chants de marins)
Samedi 23 septembre
SCÈNE DE LA CALE SUD
14h30 Contes de Loire (CNabum)
16h Dis c’est quoi un cœur ? (spectacle musical de marionnettes)
Dimanche 24 septembre
SCÈNE DE LA CALE SUD
14h Les Fis d’Galarne (chants de marins)
15h Contes de Loire (CNabum)

C’est Nabum•
Si la Loire m’était contée


mardi 29 août 2017

Ne voyez-vous rien venir ?



Ils sont où les romains ?


Il était une fois en des temps lointains, de sombres histoires de pouvoir comme on aime encore en voir. Les acteurs de cette histoire n'étaient pas des tendres, ils avaient mauvaise réputation et la fâcheuse habitude de ne pas coucher sur le papier le récit de leurs exploits pour la simple et bonne raison que ce support n'existait pas !

Soucieux de rétablir ici la menterie vraie, je viens suppléer les chroniqueurs d'alors qui avaient bien mieux à faire que de décrire de telles horreurs. Que les âmes sensibles passent leur chemin, les lignes qui vont suivre sont faites de larmes et de sang. C'était en un temps où la vie des humbles ne valait pas tripette. Depuis, rien n'a beaucoup changé hélas !

Nous sommes en 451, un méchant homme du nom d'Attila a décidé ses hommes à venir en Gaule pour y faire tourisme et profit. Quelques belles tueries et de grands pillages doivent agrémenter leurs vacances itinérantes. Les camping-cars d'alors étaient de lourds chariots de bois chargés, au-delà des normes en vigueur, d'instruments contondants et d'engins de siège. N'ayant plus de place pour leurs provisions, ils étaient contraints de trouver sur place de quoi se sustenter. La monnaie unique n'étant pas encore en application, le pillage était leur seul recours ! 

Attila et ses Huns avaient jusqu'alors pratiqué le chantage et la menace pour obtenir menue monnaie auprès du Saint empire d'Orient. Depuis peu, même quand ils faisaient les gros yeux, ils n'obtenaient plus le prix de leur chantage. Alors, pour montrer de quel bois ils se chauffaient, Attila entreprit un petit tour de Gaule.

Il entama son périple, le 7 avril à Metz où il fit grand et vilain carnage pour marquer les esprits. Il passa près de Lutèce où une dame Geneviève lui fit tant d'effet qu'il renonça à la contrarier avant que de jeter son dévolu sur la bonne ville d'Orléans. Il y a des traditions locales qui aiment à passer les siècles, le Siège, pour la ville des bords de Loire, constitua sa marque historique !

Attila avait dans la place des traîtres à sa botte ! Sangiban et ses Allains étaient disposés à se vendre au plus méchant et pour l'heure, c'était le visiteur qui tenait le flambeau. Mais d'autres ne voulaient pas céder à la force. Il se trouve toujours des héros pour inverser le cours de l'histoire. C'est le bon Anian qui joua à sa manière le rôle qui fut dévolu à une bergère un millénaire plus tard !

Anian, ayant vent du danger qui sourdait, fit prompt voyage en Arles afin de prier Aétius, le grand guerrier romain de venir au secours de la ville. Aetius et ses amis Wisigoths mirent un peu de temps à réunir leurs troupes pour voler au secours de la ville de Loire. Il fallait trouver moyen efficace pour arriver sur place avant qu'il ne soit trop tard.

Ils remontèrent le Rhône en bateau, firent quelques lieues sur terre, avant que de filer vers notre ville sur la Loire. Jamais on n'avait vu plus belle armada sur le fleuve. Des centaines de bateaux chargés d'hommes et de bêtes, d'armes et d'engins de guerre. C'était les bateaux de l'alarme, il fallait aller vite, le danger pesait lourdement sur la ville.

Nous sommes fin mai, Attila organise son siège. La ville se prépare à subir violents assauts et grandes privations. Anian qui est revenu à temps de son escapade en Arles, exhorte ses fidèles (le bonhomme est évêque) à tenir bon. La foi peut soulever des montagnes ou laisse espérer au miracle céleste.


Aétius et ses alliés Théodoric et son fils Thorismond sont bien ennuyés. Les eaux sont basses et leur armada avance à grand peine. Sur la Loire, plus d'un grain de sable entrave l'avancée de l'armée de secours. Vont-ils arriver avant qu'il ne soit trop tard ? C'est tout le suspens de cette belle histoire. Pour l'instant, les choses tournent au vinaigre pour la ville d'Orléans.

Attila, après quelques jours de siège, pense être prêt à l'assaut final. Dans la ville, le peuple gronde. L'impatience des uns, la trahison des autres font joli désordre et grand désarroi. Anian sentant la colère monter exhorte le bon peuple : « Montez sur les remparts mes bons amis et observez la Loire vers le levant. Ne voyez-vous rien venir ? » Et les braves gens de dire tous en chœur : «  Non Monseigneur. Nous ne voyons que l'eau qui nous noie et le sable qui s'accroît ! » L'évêque de les rassurer avec ces douces paroles : « Ne perdez pas patience mes amis, le seigneur du ciel nous viendra en aide. »

Le 9 juin, l'inquiétude se fait encore plus grande. Autour de la ville, chacun peut voir les hordes barbares faire grands préparatifs pour l'assaut final. Une délégation de notables vient demander à Aignan d'agir à nouveau. Le religieux espère l'arrivée des troupes, c'est son vœu le plus cher, mais il n'est sûr de rien. Il recommence le même discours : « Montez sur les remparts mes bons amis et observez la Loire vers le levant. Ne voyez-vous rien venir. » La populace est bonace, elle se laisse faire et répond cette fois : « «  Non Monseigneur. Nous ne voyons que les nuages qui pleuvoient et le tonnerre qui grondoit ! »

Effectivement, à partir du 10 juin de l'an de grâce 451, il se mit à faire sur le pays une tempête comme rarement on ne vit. Vous pouvez constater par vous même sur le site de météo-France la vérité de mes dires. Toujours est-il que pendant quatre jours, des trombes d'eau s'abattent sur la ville et ses assaillants. Les Huns pour féroces qu'ils puissent être n'aiment pas être mouillés, la chose est avérée et sera vérifiée.

Pendant ce temps sur la Loire, le vilain temps provoque un miracle. Le fleuve fait des joues, il grossit à vue d'œil et les eaux emportent bien vite les bateaux de l'alarme. Le moral des troupes remonte aussi vite que le niveau de l'eau. Les embarcations prennent de la vitesse, elles volent désormais au secours de la ville.

Au matin du 14 juin, le soleil revient pointer son nez sur un décor bien changé. La montée des eaux a défait le bel ordonnancement de l'armée de siège. Les hommes d'Attila ne connaissent pas la Loire, ils le regretteront amèrement. Mais n'allons pas si vite en besogne, dans la ville la peur gagne tous les esprits et provoque la même rengaine.

La population toute entière se retourne vers son évêque. Anian qui semblant perdre un peu la mémoire leur demande pour la troisième fois : « Montez sur les remparts mes bons amis et observez la Loire vers le levant. Ne voyez-vous rien venir ? » Le peuple est patient pour les grands, il s'exécute avant que Huns ne s'en chargent : « «  Oui Monseigneur. Nous voyons des hommes qui ramoient et des soldats qui guerroient ! » Le miracle a eu lieu, Anian gagne ses lettres de sainteté et deviendra bien vite notre Saint Aignan vénérable.

Les troupes d'Attila se lancent à l'assaut avant qu'il ne soit trop tard. Les Huns qui ne sont pas malins traversent la Loire et découvrent alors la force redoutable du courant. Beaucoup d'entre eux sont emportés comme fétus de paille et vont se noyer un peu plus loin en aval de la ville. Rares sont les barbares qui franchissent les murailles.

La ville échappe au massacre, le siège est levé, Aetius glorieux, Aignan vénéré, les Allains honteux et Attila défait. La Loire a joué un rôle essentiel. Les hommes, dans leur vanité habituelle se sont appropriés la gloire de la victoire. Je viens ici rétablir la vérité. C'est le fleuve qui a tout fait car c'est lui le maître des lieux. Il serait bon de ne pas l'oublier, il pourrait bien un jour nous le rappeler !

Historiquement vôtre.


lundi 28 août 2017

Mon pays d'en France



Mon pays d'en France



C'est dans mon pays d'en France
Un petit coin de bonheur
Le berceau de mon enfance
À tout jamais dans mon cœur
C'est au creux de son château
Monument de l’histoire
Que se reflète en ses eaux
Notre glorieuse Loire

De ses tours majestueuses
On découvre le Val
Des lumières somptueuses
Pour cet écrin médiéval
Il est le gardien précieux
De la Sologne voisine
Du Berry mystérieux
Bien au delà des collines

Un très grand du Royaume
A disposé de son nom
Après qu'un enfant des chaumes
Lui octroya son renom
Notre Duc Maximilien
Aménagea les levées
Maurice le bon chrétien
En sera sa fierté

C'est dans le creux de ses douves
Que se lovent les amants
Le soir entre chien et louve
Ils admirent ce diamant
La forteresse éternelle
Conservera leurs secrets
Bien caché dans ses tunnels
Comme son trésor discret

Le ciel aux mille couleurs
L'inonde de ces nuances
Qu’un soleil enchanteur
Lui a données en créance
Alors ses pierres blanches
Se font ainsi le reflet
C'est une douce revanche
En un somptueux ballet

C'est ici qu'est un château
Joyau de notre Sully
Perché au milieu de l'eau
Perle de mon beau pays
Dans mon village d'en France
Un petit coin de bonheur
Le berceau de mon enfance
À tout jamais dans mon cœur

Aquarelles de Guyle Rayne

Mon pays d'en-France c'est aussi 
 
Gien
Chambord
Orléans
Amboise
Châteauneuf
Ussé

dimanche 27 août 2017

Le ciel lui est tombé sur la tête.



« Lug, viens à son secours ! »



Par Toutatis, voilà bien ce qui devait lui arriver à force de réveiller les vieilles légendes celtes, les mages et les fées Carabosse. Il se pensait pourtant à l’abri du désastre : lui, qui avait la tête dans les nuages, il regardait tout ça avec distance et un petit sourire en coin. Il feignait de ne pas croire aux vieux dieux de notre Panthéon ligérien quand soudain Taranis fit tomber la foudre sur son crâne tourmenté …

C’est dans un bruit de tonnerre qu’il se réveilla en sursaut. C’en était fini de ses songes : les douces illusions finissent par se briser au contact du réel. La vie est ainsi faite qu’elle impose toujours des désillusions et des trahisons, des coups tordus et des reniements. Au chant du coq, l’affaire était réglée : il était déchu, tombé de son clocher d’en France pour trois écus et quelques seaux de ce son dont on nourrit les ânes.

Si un magnifique arc-en-ciel barrait alors le paysage au dessus de la Loire, c’était pour mieux faire flèche de tous bois. Il était pris pour cible, percé au cœur d’une étrange langueur. Il n’était plus rien qui puisse sauver le barde, ligoté et bâillonné ; il se retrouvait, une nouvelle fois, sur la branche d’un chêne, dernier gland de la récolte. Sa prose ne plaisait plus à qui l’avait jadis chantée.

Comment se relever dans pareilles circonstances ? Le ciel en tombant eut la délicate attention de lui accorder un rayon de Lune. C’est ainsi qu’il se libéra de ses entraves, qu’il découvrit enfin que rien ne valait la liberté et l’indépendance. À vouloir emprunter d’autres pas, à croire qu’il n’était pas assez grand pour côtoyer les étoiles, il avait obscurci son ciel et réduit son horizon. Les pieds nus ne suffisent pas quand ils se contentent de suivre les pas d’un autre.

Un ciel qui tombe si bas repousse au loin les nuages noirs et menaçants. Le voici sur un territoire neuf, un espace à réinventer. C’était ce qu’il fallait pour retrouver des ailes ; ses semelles s’étaient usées à trop traîner les pieds. Désormais, il avait le terrain dégagé et l’envie de brûler les étapes. La prudence cependant s’imposait à ce « raconteux » de fredaines : le risque était grand pour lui de devenir étoile filante, de celles qui se brûlent les ailes à la première occasion.

Le ciel mis à bas, il n’avait plus qu’à se bâtir un nouveau monde, un décor de légende et de mystère. Le temps était venu de déchanter pour ne plus se consacrer qu’aux histoires à dormir debout. L’absence de ciel dans la nue étant propice, il faut bien le reconnaître, à cet étrange dessein. Faire rêver les gens en plein jour, loin des projecteurs factices d’une scène où l’on ne fait que brûler les planches à son propre ego .

C’est dans le petit cercle des veillées d’autrefois que le conteur trouvera sa place. Le ciel lui en est témoin : il avait eu la folie des grandeurs, il poursuivait une inaccessible étoile. Se retrouver le nez dans le gazon était ce qu’il y avait de plus salutaire. Loin des grèves et rivages, le diseux de sornettes dut se réfugier dans la grande forêt des Carnutes. Même si un vénérable druide à la serpe d’or lui coupa l’herbe sous le pied, il reste encore des pissenlits avant que de les déguster par la racine. Il avait encore le temps ; lui qui aime tant à les savourer avec des œufs mollets, voilà qui lui faisait une belle jambe !

Merlin lui vint en aide. Un petit souffle de vent se fit brise légère. Elle repoussa tout ce fatras qui encombrait sa tête. Il redevenait homme nouveau, libéré de ses fardeaux. Une nouvelle existence se présentait à lui. Comme les chats noirs, il avait encore une dernière vie dans sa manche. Il pouvait enfourcher son balai pour voler vers cet ailleurs qui était souvent bien meilleur.

Tout cela n’est pas sorcier. Nul philtre ni potion. Ce que je viens de vous narrer n’est pas le fruit de son imagination ; notre homme n’a pas respiré les vapeurs du gui que l’on brûle. Le ciel lui est effectivement tombé sur la tête ; la preuve en est cette bosse qu’il arbore fièrement sur le crâne : un véritable œuf de poule aux œufs d’or qu’il s’est empressé de cacher dans sa bourriche à malice.

Il jouit de toute sa déraison ; il n’a plus de conte à rendre à personne. Il est désormais le seul maître à son bord. Compte tenu de son détestable caractère, c’est ce qui devait lui arriver de plus profitable. Il reprendra la route, débarrassé de ses doutes. C’est au pays des contes qu’il va poser ses valises, là où les rêveurs construisent des châteaux de Cocagne.

Célestement sien.

samedi 26 août 2017

Tout en sifflant une bouteille.

À la vôtre

 

Tout en sifflant une bouteille
J'imagine des merveilles
Tout en vidant une chopine
Je taquine ses copines
Tout en trinquant à ta santé
Je déguste à pleine lampées
Ce nectar magnifique
Tout droit sorti d'une barrique

A résisté, maudit bouchon
Voulait sans doute que je croupisse
Sans atteindre ce doux flacon
À la lisière de ce délice

A traînassé ce vilain garçon
Voulait sans doute que je le maudisse
Ce merveilleux vin de Chinon
Qu'il a vidé dans un calice

Tout en sifflant une bouteille
J'imagine des merveilles
Tout en vidant une chopine
Je taquine ses copines
Tout en trinquant à ta santé
Je déguste à pleine lampées
Ce nectar magnifique
Tout droit sorti d'une barrique

A fredonné une chanson
Tout en assouvissant son vice
En m' vidant à p'tits gorgeons
Ce qui me mit'en supplice

A tout dégusté mon cruchon
Ne m'offrant qu'un goût factice
Ce n'est qu'un vulgaire poch'tron
Mais qu'on appelle la police !

Tout en sifflant une bouteille
J'imagine des merveilles
Tout en vidant une chopine
Je taquine ses copines
Tout en trinquant à ta santé
Je déguste à pleine lampées
Ce nectar magnifique
Tout droit sorti d'une barrique

Allez l'ami enfin vidons
Fais de moi ton nouveau complice
Toi qui sera mon vigneron
Moi qui me mets à ton service

Jusqu'au matin, nos verres levons
et toute la nuit sous ces auspices
À bout de force nous trinquerons
À notre ivresse initiatrice



Le funambule de l’inutile.



Les points de suspension.


Il était une fois un écrivain en mal d’imagination. Les mots s'échappaient péniblement de sa plume d’autant plus qu’il utilisait un clavier. Il avait le phrasé lourd, la ponctuation laborieuse, le lexique sans imagination ni fioritures. Il cherchait ses mots, allait à la ligne plus souvent que nécessaire, tentant ainsi de reprendre son souffle.

Il pissait du texte comme on dit si prosaïquement dans le métier. Il se perdait en répétitions, s’égarait en métaphores creuses, se fourvoyait en calembours incertains. Il avait perdu la main quoique, pour une fois, les fautes de frappe ne fussent pas légion. Il faut admettre qu’il avançait péniblement sur le chemin d’un écrit qui ne sortait pas du cœur.

Il se prit alors au jeu de la confusion, singeant les mots tordus, il devait se contenter de mots crochus, de glissades lexicales, de confusions sémantiques, d’approximations phoniques. C’était laborieux et cela n’aurait certainement pas intéressé grand monde si soudain, par un incroyable renversement de dernière minute, la lumière n'était venue, le miracle ne s'était produit.

Incapable de trouver le mot de la fin, l’équilibriste de la chronique, le funambule de l’inutile , sans espoir de chute, dut se rabattre sur une pirouette dont il avait le secret. Il laissa en suspens sa dernière phrase, lui octroyant des points de suspension qui permettaient l'ellipse et ouvraient de nouvelles perspectives à des lecteurs qui resteraient forcément sur leur faim. En multipliant par trois son point final habituel, il pensait certainement élargir son propos.

C’est alors que les trois points absorbèrent lentement tous les mots inutiles qui avaient vainement tenté de constituer un récit médiocre. L’écran avait pris la main, le clavier ne répondait plus et, médusé, le pauvre scribe ne put que constater l’effacement irrémédiable d’un texte qui, de toute manière, ne serait pas resté dans les mémoires, à l’exception notable de celle de son disque dur.

Les points se gonflèrent, devinrent bien vite énormes. Ils avaient littéralement tout avalé. Il ne restait plus qu’eux en bas de page. Ils occupaient la dernière ligne qui était, dans le même temps, la première. L’auteur vit alors, médusé, les trois points s’élever lentement sur la page, comme s’ils étaient des ballons gonflés à l’hélium. Ils montaient en lâchant du lest, en laissant échapper quelques lettres, des espaces et des signes de ponctuation, des minuscules et des majuscules dans une écriture à rebours dont notre homme ne percevait pas encore le sens.

Puis, progressivement, il comprit que la machine avait pris le contrôle, qu’elle jouait elle aussi avec les lettres, qu’elle se servait de la masse de données qu’il lui avait confiée pour créer à son tour un texte plus satisfaisant à ses yeux que l’immonde salmigondis que son maître lui avait confié. L’ordinateur ordonnait autrement, il donnait libre cours à son imagination.

Un texte naissait ici, par la magie des points de suspension en élévation. Quand ils en vinrent au sommet de la page, ils éclatèrent en une explosion magnifique. Les ultimes signes cabalistiques qui étaient restés inemployés se transformèrent, se colorèrent, s’octroyèrent une nouvelle police, s’offrirent un corps plus gros et s’étalèrent en lettres capitales en tête de chapitre. Un titre était né et les points de suspension pouvaient tirer leur révérence en disparaissant de l’écran telles des étoiles filantes.

Notre écriveur à la petite semaine ne dit jamais rien de la métamorphose qui venait de se dérouler devant lui. Il signa, toute honte bue, l’œuvre magnifique que lui avait octroyée sa machine. Il eut du succès grâce à ce premier écrit mécanique, se fit un nom, fréquenta alors les salons littéraires, les plateaux de télévision, les grands salons du livre. Il y avait désormais devant lui de grandes files d’attente : les chalands se précipitaient pour obtenir sa dédicace. Il vendait, il était célèbre.

Il se garda bien d’avouer l’origine de sa verve extraordinaire, de sa prose si variée, de son imagination si féconde. Il usurpait une gloire dont il avait toujours rêvé. Parfois cependant, dans le secret de son bureau, quand l’ordinateur accomplissait seul le travail de distribution des signes et de création littéraire, il avait bien quelques scrupules mais il jouissait pleinement de ses bienfaits sans chercher à comprendre.

Puis, un jour, il découvrit que les autre vedettes de la littérature procédaient de la même manière que lui. Elles disposaient toutes d’un ordinateur autonome, d’une machine douée de sensibilité. Il n’était pas le seul : il avait simplement eu la chance d’être choisi parmi les milliers de besogneux de l’écrit. Un virus informatique avait fait de lui un élu, tout ça grâce à trois petits points de suspension qui avaient su faire leur chemin, l’élever vers les sommets de la notoriété.

Il garda cette habitude et tous ses textes désormais se terminaient par ce petit signe magnifique. Le funambule de l’inutile n’avait pas trouvé de raison à sa folle assuétude : elle demeurait toujours aussi vaine mais cette fois, on ne lui tournait pas le dos : les gens importants boutaient leur chapeau à son passage, réclamaient sa présence. Il est vrai que cette société aime à honorer les moins brillants des siens…

Suspensivement vôtre.

jeudi 24 août 2017

L'eau en question !


H20



Faut-il de l'eau de là pour qu'elle soit bénite ?
Pourquoi les marins d'eau douce ont-ils des manières si dures ?
Faut-il l'achever pour capturer de l'eau vive ?
Doit-on poser des pièces à nos eaux usées ?
Comment remonter les basses eaux ?


Peut-on entendre une voie d'eau ?
Le pompon du marin est-il tricoté d'un fil de l'eau ?
Le conflit israélo-palestinien peut-il tourner en eau de boudin ?
Peut-on mettre de l'eau dans son vin quand on est à sec ?
Avec quel outil doit-on couper son eau ?


Sous les ponts de Loire, l'eau peut-elle descendre en scène ?
Faut-il se jeter à l'eau pour se noyer dans un verre ?
Comment nager entre deux eaux sans se mouiller ?
Comment rattraper quelqu'un qui dérive dans une eau courante ?
Comment l'eau a-t-elle réussi à faire son trou ?


Sur une mer d'huile, l'eau salée bout-elle plus vite ?
Quelles fleurs peut-on arroser avec des mortes eaux ?
Comment apporter de l'eau à son moulin quand on est dans le vent ?
Est-il facile de réveiller une eau dormante ?
Comment peser de l'eau lourde ?


Comment mettre de l'eau dans le gaz quand on manque d'air ?
Faut-il nécessairement du pain sec pour boire de l'eau fraîche ?
De l'eau ou du feu qui a déclenché les hostilités ?
L'eau ne peut-elle pas être mieux que simplement potable ?
Les gros poissons ne se pêchent-ils qu'en eau trouble ?


Faut-il s'être brûlé les doigts pour inventer l'eau chaude ?
Peut-on faire boire un cheval dans une eau croupie ?
Faut-il avoir le sens du partage pour faire eau de tous parts ?
Au-delà de ce barrage hydraulique doit -on crier eau secours ?
Peut-on avoir l'eau à la bouche sans avoir la goutte au nez ?


Comment descendre un sportif qui est en eau ?
Comment marcher sur l'eau quand on est au creux de la vague ?
Dans quel pot faut-il mettre l'eau de rose ?
Pourquoi l'élevage bovin français va-t-il a vau-l'eau ?
Faut-il se brûler les ailes pour terminer le bec dans l'eau ?


Faut-il être clerc pour vendre de l'eau de roche ?
La mémoire de l'eau est-elle susceptible d'avoir Alzheimer ?
L'eau gazeuse a-t-elle des problèmes d'aérophagie ?
Pourquoi, pour beaucoup de peuples avoir de l'eau ne coule-t-il pas de source ?
Faut-il mettre une rustine avant de pomper une eau plate ?


Sur l'Everest faut-il boire de l'eau oxygénée ?
Le porteur d'eau peut-il être payé en liquide ?
Existe-t-il une eau de toilette sèche ?
Est-ce le bouilleur de cru qui prépare l'eau distillée ?
Le pédalo rentre-t-il dans le cycle de l'eau ?


Aqueusement vôtre

Photographies de différents photographes de Loire
Merci à eux

 

Souffler n’est pas jouer

Sur un air d’accordéon Fabre, en bon forgeron qu'il était, disposait d’un soufflet gigantesque qu’il fallait actionner avec une lo...